Marc Pilon

  

marcJe suis né à Ottawa en 1964. Étant le plus jeune d’une famille de cinq garçons, ma vie n’a pas toujours été facile. J’ai passé ma jeunesse à Maniwaki, près d’une réserve indienne.

Je suis né avec une maladie congénitale. J’ai une maladie des os qu’on appelle « ostéogenèse imparfaite ». De ma naissance à 15 ans, j’ai subi pas moins de 20 opérations et me suis fait plus de 80 fractures diverses. Je peux dire que j’ai servi de souris de laboratoire. Mes parents signaient des permissions d’opérations en espérant je ne sais trop quoi. Maintenant, je dois vivre avec les résultats des belles réussites de mes tortionnaires.

À 27 ans, j’ai eu une hernie dans la colonne cervicale. Les médecins devaient l’enlever. Ils ont manqué mon cou, c’est le cas de le dire, et j’ai passé à deux poils d’être quadraplégique. Depuis ce moment, je suis en fauteuil électrique.

Quoi qu’il en soit, je suis devenu positif face à la vie. C’est au travers des grosses épreuves qu’on devient quasi intouchable. J’ai passé par les mêmes chemins que les autres de mon âge, mais… en roulant au lieu de marcher. J’ai fait toutes mes études dans des écoles pour les gens dits « normaux ». Pourtant de tous ces gens qu’on dit « normaux », quelques-uns finiront dans une prison, un hôpital ou au bout d’une corde. Donc, je ne suis ni mieux ni pire qu’eux. Il y a une chose que je trouve bien plate : mes parents étaient tellement contents que je fréquente l’école NORMALE, que dès que j’avais 50 % sur mon bulletin ils me disaient BRAVO. Pourtant, il m’aurait fallu un bon coup de pied au derrière pour que j’avance plus. Je ne demande pas d’avoir eu des 100 %, mais des petits 80 % m’auraient ouvert plus de portes.

Dès mes 18 ans, j’étais lâché dans la fosse aux lions. Je travaillais pour Promotion handicap Estrie. Je devais faire respecter les règlements pour que les immeubles deviennent accessibles aux personnes en fauteuil roulant. Du bas de mes quatre pieds, je devais m’obstiner avec des propriétaires pour qu’ils fassent les choses et qu’ils les fassent correctement.

C’est drôle, j’ai 40 ans et j’ai fait plus de bénévolat que bien des retraités sur leur lit de mort. Je ne dis pas ça méchamment. J’ai un grand respect pour les gens âgés. Je crois qu’il n’y a pas de jeunes, vieux, ménopausées, entreposés, ados, pectoraux et « homosapienninos ». Il y a juste des individus qui demandent à vivre et à être heureux.

J’ai un fils de 15 ans. Il est handicapé comme moi. Il n’a pas juste hérité de mon gros… sens de l’humour. Je l’aime par dessus tout et je ne fais pas juste le dire ici, je lui dis à tous les matins. On a une belle complicité. Sans lui, je ne serais pas le même. Il m’a aidé à devenir un bon père et quelqu’un de bien en même temps. Je fais pour mon fils ce que j’aurais voulu que mes parents fassent pour moi. Je veux lui donner tous les outils pour qu’il fonce dans la vie. Je veux au moins qu’il essaie et, si la société le rejette ou le met de côté, je serai toujours fier de lui.

Si un jour tu me croises, viens me voir. Si tu es un gars, on va parler et si tu es une femme, on va jaser plus longtemps.